Étude comparative : Les conditions pour devenir magistrat en droit vietnamien et en droit français
Les conditions pour devenir magistrat en droit vietnamien et en droit français
Le magistrat est un fonctionnaire chargé de rendre la justice en faisant l’application des lois et ce, au nom de l’État. Il est donc investi de l’autorité judiciaire. Il existe en France, une dualité d’ordre juridictionnel : l’ordre judiciaire chargé de résoudre les litiges opposant deux personnes privées, ainsi que l’ordre administratif qui lui, est chargé de résoudre les litiges opposant une personne privée à une personne publique. Cette dualité n’existe en revanche pas au Vietnam. En effet, chaque tribunal, à partir du niveau de tribunal de province, dispose à la fois d’une chambre administrative et de chambres civile, pénale…
Depuis l’arrêt du Conseil d’État français rendu le 2 février 1962, le terme de magistrat, ne désigne en France que les juges de l’ordre judiciaire. Il conviendra donc dans l’étude de la question, de laisser de côté, les conditions relatives aux juges de l’ordre administratif.
En France, les magistrats sont nommés par décret du Président de la République à l’issue d’un recrutement qui peut être de deux sortes : par l’École nationale de la magistrature, ou bien par la voie d’un recrutement latéral par accès direct à un poste. L’École nationale de la magistrature est la voie d’accès normale à la magistrature. Pour accéder à L’ENM, il faut posséder un diplôme de second cycle d’études supérieures, c’est-à-dire au minimum en Master 1 en droit. Il faut également avoir passé le concours d’entrée, et avoir moins de trente et un ans au 1er janvier de l’année du concours. En outre, les fonctionnaires ou agents de l’État, peuvent passer un autre concours d’entrée à l’ENM, s’ils ont au moins quatre ans d’ancienneté et s’ils sont âgés de quarante-huit ans et cinq moins au plus. Enfin, il existe un troisième concours réservé aux professionnels du secteur privé justifiant d’au moins huit ans d’activité et ne devant pas être âgés de plus de quarante ans. Il existe également un recrutement latéral qui consiste à faire entrer dans la magistrature, sans passer par l’ENM, des personnes dotées d’une considérable expérience professionnelle dans le domaine juridique. Depuis 1992, tous les postes de la magistrature sont accessibles par ce mode de recrutement. Pour être recruté, il faut être de nationalité française, être titulaire d’un diplôme équivalant à quatre années d’études supérieures, jouir de ses droits civiques, et enfin être sélectionné par le comité d’avancement.
Au Vietnam, les conditions pour accéder à la fonction de magistrat sont moins souples, puisqu’en effet, il faut avant tout être citoyen vietnamien, avoir une bonne conduite, être titulaire d’un diplôme universitaire de droit, avoir suivi la formation professionnelle de magistrat à l’Académie de la magistrature, il faut avoir expérimenté une profession juridique pendant un laps de temps déterminé par un texte législatif, il faut également avoir réussi le concours de juges de carrière organisé devant le conseil de sélection des juges. En outre, il fut être recommandé par le conseil de sélection et de surveillance des magistrats pour ensuite être nommé magistrat par décision du Président de l’État. Alors que les magistrats français sont nommés à vie, le mandat des magistrats vietnamiens est lui d’une durée de cinq renouvelable plusieurs fois. En pratique, ce mandat est toujours renouvelé. Les seconds mandants sont d’une durée de dix ans.
Par ailleurs, il existe au Vietnam des conditions particulières de nominations pour les magistrats de la Cour Suprême : il faut être juge de rang supérieur pendant au moins cinq ans, ou alors justifier d’une expérience dans les hautes fonctions publiques, ou bien être un expert juridique de grande qualité. Il est également nécessaire d’être apte à statuer sur les procès soumis à la Cour Suprême. Après avoir déposé une candidature auprès du Conseil national de sélection et de surveillance, il faut être sélectionné par le Conseil, et recommandé au Président de la Cour Suprême. Il faudra enfin l’approbation de l’Assemblée nationale, puis une décision de nomination par le Président de la République. Une procédure plus ou moins similaire est prévue en France, puisque les conseillers de la Cour de cassation sont nommés par décret du président de la République sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature. En revanche, puisque la France est un régime où les pouvoirs sont bien séparés, le pouvoir législatif, le Parlement, n’a pas son mot à dire dans la nomination des juges français.
Alexandre GERMOUTY
Président de l'AJAI 2022-2023